Son regard s’attarde sur les courbes des passantes. Des regards qu’il dissimule sous un air de fausse innocence. L’œil lubrique derrière des lunettes noires, il regarde les épaules. Fortes. Rondes. Tombantes. Crispées. Détendues. Nues. Surtout les épaules dénudées. Striées d’un mince cordon qu’il ferait glisser avec ses dents.
Il aime les peaux bronzées, foncées, au goût de soleil. Souvenirs d’un voyage dans les pays chauds. Épaules tropicales. S’il en a l’occasion, il porte un regard sur la nuque, qu’il fait glisser le long du dos. Aucune ne se doute de l’examen furtif, du jugement hâtif. Mais il ne pense à rien, ne juge de rien. Il apprécie. Il goûte d’un œil connaisseur les multiples courbes qui s’offrent à ses yeux. Certaines ont des bras sublimes. Une caresse du revers de la main prouverait leur douceur. Une peau douce comme le satin, qui s’allonge sans fin. Une caresse infinie, d’une langueur infinie qui arracheraient des frissons et des vagues de passion. Des doigts qui s’agripperaient pour retenir le contact de cette main encore une autre seconde et une autre encore.
Il n’aime pas les bijoux. Artifices inutiles qui voilent la véritable beauté du corps. Qu’est-ce qu’un long cou attirant enchaîné d’or? Son regard se détourne. Durant de longues minutes, il s’évade dans le souvenir de la première femme qu’il ait aimé. Aimé? Il était encore jeune à l’époque, impatient d’apprendre, de connaître, de laisser ses sens apprivoiser les délices féminins. Enfin mettre les mains sur de fines épaules, les masser. Sentir sous ses doigts les muscles s’abandonner à son contact. Longuement, il l’avait regardé, nue et offerte. Mal-à-l’aise devant son regard inquisiteur, elle avait pris les devants. Décevant. Elle avait commencé à le caresser. Il aurait préféré attendre. Regarder. Toucher. Sentir et goûter. Il aurait préféré prendre le temps d’éveiller son plaisir. Mécaniquement, elle avait précipité les gestes. Il était resté sur sa faim. Elle n’avait jamais eu la chance de comprendre comment elle n’avait pu le combler.
Un éclat orangé lui fait soudain lever la tête. Quelle splendeur! Habillée d’une sublime robe couleur de feu, diaphane, sans fards, ni bijoux, une princesse africaine s’expose à son regard. Elle attend, impatiente, un rendez-vous qui n’arrive pas. Hautaine et grave, elle rayonne d’un éclat mystérieux. Aucune bretelle! La nuque dégagée par une coiffure relevée sur la tête, les épaules dévoilent une peau terre brûlée qui lui coupe le souffle. Tranquillement comme un prédateur, il détaille, découpe chaque parcelle de peau qu’il aperçoit. La chute de reins le ravi et il regarde sans plus aucune réserve, descendant son regard le long des longues jambes fines. Souriant devant le petit pied en sandale qui tapote le sol furieusement. Il n’ose regarder les bras. Des bras qu’il rêverait d’avoir autour de sa taille, autour de son cou, pour sentir leur douceur velouté. Il aimerait voir le contraste de ses mains sur sa peau de café. De l’épaule, son œil descend le long du bras vers les doigts qu’il espère longs et raffinés. Corrompant les doigts les plus célestes qu’il ait vu depuis une heure, une cigarette.
Déçu son regard se détourne et s’éveille devant un décolleté plongeant sur de petits seins ronds pointant à travers une magnifique broderie blanche. D’une indécence qui le fait sourire, il lève ses lunettes et plonge dans les yeux bruns de la demoiselle. Surprise, elle esquive son regard.
À suivre... 2ème partie
Pensées, reflets d'âmes emprisonnées entre l'ici et l'au-delà, murmures captés dans les égrégores anciens et nouveaux. Mots. Je marche sur le mince fil entre l'ombre et la lumière. Lumière éblouissante dans vos ténèbres. Ombre dans le jour éclatant. Je suis celle qui écoute les murmures du vent et les voix qui hurlent dans la tempête. Celle, qui des larmes, fabrique des colliers de mots et les raconte. Je suis celle qui apprend et s'inspire des êtres dont elle croise la route.
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