Un chien hurla au loin laissant dans l’air
une empreinte de désespoir. Mimi se coucha sur le sol et pleura. Les heures
s’allongèrent laissant couler de son cœur une rivière de larmes, tantôt tumultueuse,
tantôt paisible. Au cœur de sa peine, elle sentit sur elle la main chaude et
apaisante de Déhana dans laquelle elle se lova. Embryon de vie craintif au
centre de l’infini, habitée tout entière par le tourment, Mimi se vida de toute
son eau.
Avec respect!
Amère, elle avait fait défiler dans sa mémoire les
visages aimés des habitants de son village. Même le vieil homme qui n’avait pas
d’âge était venu la bercer dans sa solitude. Elle se rappelait ses histoires
invraisemblables de sorcières et de serpents ou encore de petite Mimi à qui il
arrivait des aventures extraordinaires dans les profondeurs de la jungle.
Mimi n’avait jamais vu d’animaux sauvages, mais Baba
Fhandi les faisait apparaître à la lueur du feu sur un immense drap blanc tendu
dans le vide. Avec le temps, Baba Fhandi avait bricolé avec de vieilles
planches de bois un théâtre d’ombres. Ses mains continuaient de ravir
l’imaginaire, malgré l’arthrite qui les atrophiait.
Plusieurs fois par semaine, elle venait le voir avec
un pot de pommade que Mamé lui faisait exprès. Elle lui massait les mains,
curieuse de voir apparaître aux creux de ses paumes, des lions et des girafes.
– Gentille Mimi, tes mains ravivent la jeunesse dans mes pauvres doigts.
– Dis-moi Baba Fhandi. As-tu apprivoisé tous les
animaux sauvages qui habitent dans tes mains?
Baba Fhandi avait ri longtemps. Mimi avait ri avec
lui, ne sachant trop s’il riait d’elle ou de ce qu’elle avait dit. Son rire
habita l’espace dans la cabane, ravivant les souvenirs heureux de l’enfance.
Durant la nuit, Mimi s’était accrochée au visage de Mamé, l’entourant de
ses petites mains, avide de sentir le baiser maternel sur son front. Elle
voulait garder dans son esprit et pour la vie ce regard de tendresse qui lui
permettait de respirer. Le souffle d’amour transmis de mère en fille depuis des
générations. La puissance des Mamés en expansion, l’expression de l’abondante
et généreuse Déhana sur la terre aride du Baranté.
L’aube apparut, trouvant le petit corps frêle toujours allongé sur le sol
à côté du lit. Se levant, les yeux secs et le corps léger, Mimiansa alla
chercher de l’eau à la rivière.
Le soleil se leva à nouveau sur le Baranté.
ML
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