mercredi 10 juillet 2013

Extrait - Lorsque le fond de la mer a tremblé

Pour le plaisir, voici un court extrait de Lorsque le fond de la mer a tremblé.

      Un chien hurla au loin laissant dans l’air une empreinte de désespoir. Mimi se coucha sur le sol et pleura. Les heures s’allongèrent laissant couler de son cœur une rivière de larmes, tantôt tumultueuse, tantôt paisible. Au cœur de sa peine, elle sentit sur elle la main chaude et apaisante de Déhana dans laquelle elle se lova. Embryon de vie craintif au centre de l’infini, habitée tout entière par le tourment, Mimi se vida de toute son eau.

   Amère, elle avait fait défiler dans sa mémoire les visages aimés des habitants de son village. Même le vieil homme qui n’avait pas d’âge était venu la bercer dans sa solitude. Elle se rappelait ses histoires invraisemblables de sorcières et de serpents ou encore de petite Mimi à qui il arrivait des aventures extraordinaires dans les profondeurs de la jungle. 

   Mimi n’avait jamais vu d’animaux sauvages, mais Baba Fhandi les faisait apparaître à la lueur du feu sur un immense drap blanc tendu dans le vide. Avec le temps, Baba Fhandi avait bricolé avec de vieilles planches de bois un théâtre d’ombres. Ses mains continuaient de ravir l’imaginaire, malgré l’arthrite qui les atrophiait. 

   Plusieurs fois par semaine, elle venait le voir avec un pot de pommade que Mamé lui faisait exprès. Elle lui massait les mains, curieuse de voir apparaître aux creux de ses paumes, des lions et des girafes.

   – Gentille Mimi, tes mains ravivent la jeunesse dans mes pauvres doigts.
   – Dis-moi Baba Fhandi. As-tu apprivoisé tous les animaux sauvages qui habitent dans tes mains?

   Baba Fhandi avait ri longtemps. Mimi avait ri avec lui, ne sachant trop s’il riait d’elle ou de ce qu’elle avait dit. Son rire habita l’espace dans la cabane, ravivant les souvenirs heureux de l’enfance.

   Durant la nuit, Mimi s’était accrochée au visage de Mamé, l’entourant de ses petites mains, avide de sentir le baiser maternel sur son front. Elle voulait garder dans son esprit et pour la vie ce regard de tendresse qui lui permettait de respirer. Le souffle d’amour transmis de mère en fille depuis des générations. La puissance des Mamés en expansion, l’expression de l’abondante et généreuse Déhana sur la terre aride du Baranté.

   L’aube apparut, trouvant le petit corps frêle toujours allongé sur le sol à côté du lit. Se levant, les yeux secs et le corps léger, Mimiansa alla chercher de l’eau à la rivière.

   Le soleil se leva à nouveau sur le Baranté.


Avec respect!
ML

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